Ultra-sensible aux UV, Mini-EUSO va jeter depuis l'espace un regard inédit sur la Terre.
MINI-EUSO fait route vers la Station Spatiale Internationale (ISS), prêt à mettre à l’épreuve un concept d’observation révolutionnaire.
Ce jeudi 22 août, une fusée Soyouz s’est élancée du cosmodrome de Baïkonour, au Kazakhstan, à destination de la Station Spatiale Internationale, avec à son bord un instrument scientifique unique en son genre : MINI-EUSO (Multiwavelength Imaging New Instrument for the Extreme Universe Space Observatory).
MINI-EUSO marque une nouvelle étape dans le développement du programme « JEM-EUSO » (Observatoire Spatiale de l’Univers Extrême) auquel collaborent plusieurs équipes françaises, destiné à porter dans l’espace l’étude des particules les plus énergétiques de l’univers : les « rayons cosmiques d’ultra-haute énergie ». Avec des énergies littéralement macroscopiques, pouvant atteindre celle d’une balle de tennis à 150 km/h, ces particules qui semblent être de simples noyaux d’atomes accélérés par un mécanisme encore à élucider, ont voyagé pendant des dizaines de millions d’années depuis des sources inconnues situées dans d’autres galaxies que la nôtre, avant de finir leur course en provoquant une gigantesque cascade de particules (appelées « gerbes ») dans l’atmosphère terrestre ! C’est la lumière de fluorescence générée dans l’ultra-violet par la désexcitation des molécules d’azote de l’air, elles-mêmes excitées par le passage de ces milliards de particules secondaires, qui permet aux chercheurs d’identifier ces particules, et de déterminer leur énergie et leur direction d’arrivée.
C’est donc bel et bien en regardant la Terre depuis l’espace que les scientifiques entendent ouvrir une nouvelle voie d’étude pour l’astronomie des rayons cosmiques. Avec à la clé une capacité de détection considérablement accrue ! Car si ces particules intriguent les astrophysiciens depuis leur découverte il y a plusieurs décennies, leur étude demeure particulièrement difficile, en raison de leur extrême rareté : à peine une particule par mètre carré par milliard d’année, pour les plus énergétiques d’entre elles ! En plaçant un instrument en orbite, il devrait être possible de couvrir un volume d’atmosphère sans précédent, à l’affût de ces gerbes cosmiques si précieuses pour l’astrophysique des hautes énergies et la physique des astroparticules.
Une fois qu’il aura rejoint l’ISS, MINI-EUSO, qui résulte d’un partenariat entre les agences spatiales russe (RosCosmos) et italienne (ASI), pourra être mis en place avec la participation des astronautes pour opérer périodiquement depuis l’intérieur de la station spatiale, à travers un hublot de quartz dans le module russe Zvezda.
Avec cet instrument capable de détecter des photons uniques dans un champ de vue de 40° à raison de 400 000 images par seconde, la collaboration internationale JEM-EUSO, regroupant 300 chercheurs de 16 pays distribués sur 4 continents, franchit une nouvelle étape dans le développement de sa stratégie d’observation. Et si MINI-EUSO n’est pas encore dimensionné pour observer directement les rayons cosmiques d’ultra-haute énergie, il permettra de réaliser pour la première fois une carte de l’émission ultra-violette nocturne de la Terre, ainsi qu’un grand nombre d’objectifs scientifiques pluridisciplinaires, allant de l’observation de météores à l’étude de variations de la bioluminescence du plancton ou des algues, en passant par la recherche de particules exotiques de type « strangelets » (états nouveaux de la matière), l’observation de phénomènes énergétiques dans la haute atmosphère, ou encore la localisation de débris spatiaux.
Plusieurs équipes françaises ont participé très activement à l’aventure : l’APC, l’IRAP (Université Paul Sabatier de Toulouse, CNRS/INSU), le LAL (Université Paris Sud, CNRS/IN2P3) et OMEGA (UMS de l’IN2P3), avec le soutien de la première heure du Centre National d’Étude Spatiales (CNES), ainsi que du CNRS (IN2P3/INSU). Ce sont elles, notamment, qui ont conçu, développé, assemblé et testé avec précision les unités de détection principales, mettant en œuvre une électronique innovante. Ces mêmes équipes françaises avaient déjà permis à la collaboration internationale de franchir une étape décisive, avec le pilotage de sa toute première mission : la mission EUSO-Ballon, sous ballon stratosphérique, financée et opérée avec succès par le CNES en août 2014.
En attendant la prochaine étape, en 2022, avec la mission EUSO-SPB2 sous l’égide de la NASA, les équipes se préparent désormais à une nouvelle moisson de résultats, en direct de l’ISS !
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