Etude des rayons cosmiques depuis l’espace : du ballon EUSO-SPB à mini-EUSO dans l’ISS

Module de détection PDM composé de 2304 pixels (GTU = 2.5μs, soit 400.000 images par seconde) © JEM-EUSO

 

Dans la nuit du 24 au 25 avril 2017, la mission EUSO-SPB a pris son envol depuis la base de la Nasa à Wanaka en Nouvelle-Zélande. Après le succès de la mission du CNES EUSO-Ballon, la collaboration internationale JEM-EUSO revient avec un instrument plus performant encore, conçu pour détecter des rayons cosmiques ayant une énergie de l'ordre de 1018eV, soit 100 000 fois plus élevée que les particules accélérées au CERN ! Une réussite à laquelle sont associés les laboratoires de l'APC, du LAL et d’OMEGA qui ont réalisé le module de détection.

Les rayons cosmiques d'ultra-haute énergie représentent l'un des mystères les plus fascinants de l'univers extrême. Avec des énergies littéralement macroscopiques, ces noyaux d'atomes qui nous parviennent d'autres galaxies, intriguent les chercheurs depuis plus d'un demi-siècle et suscitent d’intenses efforts pour élaborer des moyens d'observation nouveaux.

Il faut dire qu'il n'a été possible d’en détecter qu'un nombre très limité jusqu'à présent. Les plus énergétiques d'entre eux ne se présentent qu'à raison d'un par mètre carré et par milliard d'années ! C'est pourquoi il convient de déployer des détecteurs couvrant des milliers de km2. C'est ce qui a été fait en Argentine, avec l'Observatoire Pierre Auger, auquel la France a déjà contribué de manière décisive. Mais pour aller plus loin, les chercheurs se tournent désormais vers l'espace. L'objectif ? Se placer en orbite autour de la Terre, par exemple sur la Station spatiale internationale (ISS), et observer l'effet de l'interaction de ces rayons cosmiques d'ultra-haute énergie avec l'atmosphère terrestre.

Le déploiement d'un tel instrument spatial est un projet ambitieux et c’est pourquoi des missions précurseurs, appelées "pathfinders", ont été conçues et développées par la collaboration JEM-EUSO. Il s'agit de modèles réduits de l'instrument visé ultimement, mais qui en possèdent déjà toutes les fonctionnalités et sous-systèmes. Ils mettent ainsi en œuvre une unité de détection, nommée photodetector module (PDM). Ce dispositif est constitué de 36 photomultiplicateurs de 64 pixels chacun alimentés par des systèmes à très basse consommation de type Cockcroft-Walton. Ceux-ci sont lus par des circuits-imprimés spécifiques (de modèle ASIC SPACIROC 3) développés pour l’expérience à l’IN2P3 par le groupe Organisation de micro-électronique générale avancée (OMEGA, CNRS/École polytechnique). L’acquisition est pilotée par un FPGA et un algorithme de trigger dédié. L’ensemble de la surface focale a été intégrée, testée et étalonnée par les équipes de l’IN2P3 à l’APC (CNRS/ Université Paris Diderot/CEA/Observatoire de Paris).

 

Résultats du vol EUSO-ballon 2014 : émissivité UV au nadir © JEM-EUSO

 

L’agence spatiale CNES a poursuivi l'aventure en soutenant les équipes françaises impliquées dans EUSO-SPB, qui n’a finalement pu voler que 12 nuits au lieu des 100 espérées, en raison d’un problème au niveau du ballon de la NASA, lui-même encore en phase de perfectionnement. Le vol a néanmoins permis de collecter des données d’une richesse sans précédent et d’observer, outre les variations de l’émissivité UV de la Terre, de l’océan et de différents types de nuages, des événements d’intérêt scientifique comme des météorites et des rayons cosmiques directs, ainsi que trois événements d’origine encore inconnue, dont l’analyse est en cours.

 

Deux évènements d’origine encore inconnue acquis par EUSO-SPB en mai 2017 © JEM-EUSO

 

Un nouveau vol en ballon pressurisé financé par la NASA est d’ores et déjà prévu en 2020, avec des objectifs scientifiques encore étendus pour associer à la détection de dizaines de gerbes cosmiques l’observation de gerbes montantes résultant de l’interaction de neutrinos tau avec la croûte terrestre.

Mais c’est à présent vers l’espace que tous les regards de la collaboration internationale sont tournés, et en particulier vers l’ISS qui accueillera en 2018 la mission mini-EUSO, première version en orbite du détecteur, qui permettra d’observer le ciel à travers le hublot de quartz du module russe, transparent aux UV.

 

Intégration du détecteur à l'APC

Unités IN2P3 et INSU impliquées dans le projet : APC, IRAP, LAL (CNRS/Université Paris-Sud) et OMEGA.

Membres de l’APC impliqués dans le projet : Denis Allard, Simon Bacholle, Nathan Bleurvacq, Eric Fraisse, Philippe Gorodetzky, Guy Monier, Etienne Parizot, Pierre Prat, Guillaume Prévôt, Sahbi Selmane.

Les membres de l'équipe APC impliquée ont effectué le design instrumental (en collaboration avec le LAL) et mécanique, l'intégration, la calibration et les tests thermiques du détecteur, puis ont participé aux tests sol (avant-vol) ainsi qu'à la campagne de vol.

 

 

 

Pour en savoir plus

  • Site web d'EUSO-SPB en anglais
  • Vidéo de présentation d'EUSO-SPB

 

Contacts chercheurs et ingéninieurs

  • parizotatapc.in2p3.fr (Etienne Parizot), enseignant-chercheur à l’APC, responsable scientifique pour la France national
  • prevotatapc.in2p3.fr (Guillaume Prévôt), ingénieur de recherche à l’APC, chef de projet